01 septembre 2012

Le PIB brésilien en rade, nuages durables sur l'économie ?

Et si le Brésil, eldorado annoncé pour les investisseurs de tous bords désespérément à la recherche de relais de croissance face à une Europe et une Amérique atones, n'était qu'un feu de paille, ou pire, un miroir aux alouettes ? Et si finalement l'année 2010 et les 7,5% de croissance qu'a connu la première économie d'Amérique Latine était l'exception, et non la règle ?

Le Brésil qui croît, oui, mais jusqu'à quand ? 

2011 et les 2,7% de hausse du PIB du Brésil avait déjà montré les premiers signes d'un essoufflement inquiétant de l'économie de la 6ème puissance mondiale (dépassant la Grande-Bretagne), qui avait réussi à donner le change grâce à une excellente tenue de la consommation intérieure, malgré -déjà- un niveau d'investissements très en deçà des besoins du pays (19% du PIB, vs 35% en Chine par exemple), en particulier pour pallier l'inquiétant déficit en matière de transports publics.

Et voici qu'en 2012, les mauvaises nouvelles ont succédé aux prévisions toujours plus pessimistes, au fur et à mesure que le premier semestre avançait : d'une projection de croissance initiale à 3,3%, on est passé à 2,9% en février, puis à 2,3% en juin...avant que les analystes ne découvrent l'ampleur des dégâts : l'IBGE a publié hier les chiffres de croissance du PIB pour le 1er semestre, atteignant un misérable 0,6% vs la première moitié de l'année 2011 !

Comment expliquer une performance aussi inquiétante pour un pays qui dispose pourtant d'un tel potentiel de croissance (population jeune, richesses naturelles abondantes, évènements majeurs dans le viseur -Coupe du Monde de Football en 2014, Jeux Olympiques en 2016...) ? La faute est à imputer principalement à un double phénomène :
- L'incapacité du pays à accélérer les investissements, publics comme privés : ceux-ci ont au global décru sur  cette première partie de l'année, s'établissant désormais à un petit 17,9% du PIB. Gangrénés par une bureaucratie effrayante et une corruption endémique, les investissements d'états (à travers les fameux PAC - Plan d'Accélération de la Croissance) sont systématiquement en retard sur les prévisions, et les effets d'annonce à coups de milliards de R$ ne suffisent plus à masquer l'incurie : on apprenait ainsi en juin (moitié de l'année donc) que seulement 15% des investissements prévus sur l'année 2012 avaient été exécutés ;
- L'essoufflement de la consommation intérieure du pays, moteur historique de la croissance (en progression constante depuis 35 trimestres, soit quasi 9 années ininterrompues de hausse), mais une consommation vérolée par un endettement inquiétant des ménages : de 25% en 2007 à...45% en 2012 ! Quand près de la moitié des revenus des ménages sont absorbés par les dettes avant même de commencer le mois, c'est que ça ne sent pas très bon !
Une bonne nouvelle néanmoins dans ce sombre tableau : le chômage, au plus bas depuis 10 ans, se maintient aux alentours de 5% de la population active (officiellement...).

Endettement des familles : le graphe qui fait peur ! 

Et la suite ? Elle semble morose au moins pour ce qui concerne 2012, avec une projection de croissance annuelle qui ne devrait pas dépasser les 1,3%. Pour 2013 et les années suivantes, les économistes, le ministre de l'économie, les patrons de banques se veulent rassurants, insistant sur le fait que le pays aurait touché le "fundo do poço" ("le fond du trou"). J'avoue que j'ai un peu du mal à souscrire aveuglément au scénario de la "retomada" (la "reprise"), les fondamentaux (investissements, industrie, consommation) ne me semblant encore une fois guère rassurants. Quand on sait que l'agriculture seule a contribué pour 70% de la croissance de ce premier semestre 2012, on se dit que le Brésil s'appuie sur jambe de bois qui peut craquer à tout instant. Bien sûr, on va me dire : et la Coupe du Monde ? Et les JOs ? Je crains que ça ne soit suffisant pour masquer durablement les défaillances de ce géant aux pieds d'argile...Et j'ai à peine parlé de l'assommante bureaucratie des affaires, faisant du Brésil un pays moins accueillant pour le business que la Bosnie, la Papouasie Nouvelle Guinée ou la Mongolie (rapport de l'IFC de janvier 2012) !

Et vous qu'en pensez-vous ? Le Brésil est-il à ranger parmi les miracles...ou les mirages économiques ? ;)

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